(Je publie ce texte ancien, écrit à l'automne 2015 à l'occasion de l'exposition "Beauté Congo" à la Fondation Cartier.)
L'exposition « Beauté Congo 1926-2015 » à la Fondation Cartier mérite bien son nom. Les œuvres impressionnent, l'exposition a reçu un accueil positif et a été prolongée de quelques semaines. Mais de quelle beauté s'agit-il ? Il faut le dire : d'une beauté coloniale, ce que la fondation ne tient apparemment pas à rappeler.
Le catalogue de l'exposition jette une terrible lumière sur les pièces présentées. « Cet art ne se rattache à rien », affirme André Magnin, commissaire général. « L'art congolais n'appartient qu'à lui-même. Il est vain de chercher à l'inscrire dans l'histoire de l'art ». Disons plutôt : l'art congolais, du moins celui accroché à la Fondation Cartier, s'inscrit dans une histoire ; il se rattache aux rapports de domination, aux catégories de perception et aux échanges culturels produits par le colonialisme. Le catalogue le décrit complaisamment, en présentant cette histoire et ces rapports comme naturels et allant de soi. Les interactions dans lesquelles les œuvres exposées trouvent leurs origines ne sont jamais interrogées.